préambule : les juifs au maghreb

L'Algérie une longue étape



Le judaïsme magrébin

De l’étonnante diversité du judaïsme magrébin j’ai été témoin, toujours à mon humble niveau, depuis ma prime enfance, dans les turbulences de la seconde guerre mondiale puis de la guerre d’Algérie. 
J’ai vécu à Oujda (1933-1939), Taza (1940), Oran (1941-1944), Constantine (1944-1948), Tlemcen (1948-1952) et Alger de 1952 jusqu’au départ définitif en Septembre 1961 pour Paris.
 


Oujda : 1933-1939. Un clivage : les « sujets marocains » et les « citoyens français ».

A Oujda, ville frontière du Maroc, sous protectorat français, à 15 km de l’Algérie, je suis née française le 10-12-1933 parce que mon père, né à Tlemcen, en Algérie, colonie française, y était fonctionnaire français.
Les enfants des juifs indigènes des mellah marocains apprenaient le français dans les « écoles juives », à « l’Alliance », écoles de l’ « Alliance Israélite Universelle » fondée en 1860 pour lutter contre l’inculture et le sous-développement des communautés juives dans les pays arabes.
Les enfants de nationalité française fréquentaient l’école communale française où j’ai fait mes premiers apprentissages. Nous avions rarement l’occasion de côtoyer à l’école les enfants juifs de nationalité marocaine.
Avec la pauvreté, le manque de soins et la surpopulation, les fléaux de l’époque touchaient les juifs des mellah marocains plus que les autres couches de la population : trachome, cécité, tuberculose, épidémies. Pas d’antibiotiques, contre les insectes nuisibles (moustiques, poux, punaises, puces, blattes etc.) nous étions tous démunis. Et la Sécurité Sociale n’existait pas.
Je me souviens avoir souffert, dans ma petite enfance, de terribles conjonctivites fréquentes au Maroc qui m’empêchaient d’ouvrir les yeux au réveil. Il fallait de l’eau tiède salée et beaucoup de patience à ma mère pour que je puisse les entrouvrir.
La population entassée dans les mellah marocains vivait en majorité dans la pauvreté. Les têtes des enfants étaient souvent rasées à cause de la teigne et des terribles épidémies de typhus. Des vieillards loqueteux, maigres, malades, aveugles souvent ou mutilés, juifs ou arabes mendiaient dans les rues. La misère marginalise et exclut.
Le royaume chérifien du Maroc était un protectorat français depuis le traité du 30 Mars 1912, signé à Fès entre la 3ème République Française et le Sultan Moulay Hafid, protectorat qui perdura jusqu’en 1956 mais les juifs indigènes ne bénéficiaient pas de la nationalité française. En Algérie, le décret Crémieux avait, en 1870, enrichi la population française de 37.000 nouveaux citoyens. Leur émancipation avait été très rapide et l’assimilation à la France et à la culture européenne totale grâce aussi au rôle de l’Alliance Israélite Universelle.
Juifs qu’au 19ème siècle on appelait encore les « Yaoud al arab » : les juifs des arabes.
Mon père, français parce que né en 1903 en Algérie de père français, avait un diplôme d’instituteur, mais avait choisi de travailler à la Poste. Il avait la passion de la langue et de la littérature françaises, des belles éditions reliées. Il dessinait. Sur nos vêtements de nuit il dessinait des personnages de Disney que ma mère brodait ensuite en y ajoutant quelques petites roses, sa spécialité.
 Il jouait du violon en professionnel. Jusqu’à la crise de 1929, il était violoniste à Tanger dans un orchestre classique. Nous n’écoutions jamais de musique arabe.
A Tlemcen, raconte mon ami  de Tlemcen Guy B., à la synagogue, de jeunes rabbins chantaient le "chemah" sur des airs de  Schubert, la Sérénade notamment, (il m'en a chanté un passage en hébreu par téléphone) tels étaient la fascination pour la culture occidentale et le rejet dans les jeunes générations de tout ce qui avait fait de nous des judéo-arabes soumis à la dhimmitude depuis des siècles.
Ma sœur Josiane et moi sommes nées à Oujda dans une petite maison avec jardinet où des violettes poussaient partout.

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Photo de 1936 Claude dans le jardin.

 Dans la courette intérieure, malgré le grésil déversé en abondance, surgissaient des scorpions d’un W.C. turc dont nous ne devions approcher en aucun cas. Pendant les étés torrides, Josiane et moi nous immergions entièrement dans l’eau froide des petits bassins en ciment de la buanderie.
 A travers la grille du jardin, terrorisées, nous voyions souvent passer, suivi d’une meute de gamins gesticulant et poussant des cris perçants, Galoufa, l’attrapeur municipal de chiens errants avec son lasso, un nerf de bœuf terminé par une chaîne en fer et un anneau coulissant, et sa fourrière, une charrette cage tirée par un âne, avec grillage et barreaux de fer et 2 ou 3 malheureux klebs prostrés ou hurlant à la mort. Prévention contre la rage véhiculée par les chiens errants et les chacals du désert.
 Terreur aussi le boussadia, sorte de sorcier noir, griot ou derviche tourneur, effrayant avec ses queues de bête et ses breloques autour de la taille et toute la ferraille hétéroclite qui tintinnabulait sur lui quand il dansait au rythme frénétique de ses karbakas, sorte de crotales, grosses castagnettes en métal à très longs manches, en roulant des yeux blancs. Il était parfois accompagné d’un singe, harnaché de grelots, rubans et pompons, assis sur son épaule qui, sur ordre, "couchait comme la vieille", de un ou deux tambourineurs ou d’un enfant saltimbanque qui exécutait des sauts périlleux. Nous les entendions arriver de loin, les cris, les aboiements, le rythme fou des instruments. Nous étions affolées, terrorisées, réfugiées dans les jupes de notre mère.
Boussadia 3Boussadis enfin 



















«  Attention à Galoufa ! »  « Continue et je t’envoie à la fourrière ! » était la pire menace des adultes et la plus cruelle aussi. D’ailleurs je n’ai rencontré ces pittoresques personnages nulle part ailleurs qu’à Oujda, à travers la grille du jardin.
Je me souviens aussi avoir, à travers la grille de ce jardin, troqué la fine chaîne d’identité en or que je portais au poignet contre une boîte de conserve qu’un petit yaouled faisait rouler au bout d’une ficelle. J’étais si fière de mon acquisition ! Ma mère a beaucoup couru pour rattraper l’enfant.
Nous avons ensuite habité dans un immeuble bourgeois avec des escaliers en marbre blanc que la propriétaire, une vieille avare, nous empêchait de fouler, par crainte de l’usure, en criant : « Balek ! Balek!» quand elle nous apercevait, ma sœur et moi, avec notre petite bonne arabe dans l’escalier où nous ne faisions que passer. Au moindre bruit, elle pointait un nez inquisiteur dans l’entrebâillement de la porte. Nos appartements s’ouvraient sur le même palier. C’était, je crois, rue d’Alger. La dame un peu dérangée qui récupérait, par économie, pour la boire, l’eau des artichauts que ma mère faisait bouillir, s’appelait Mme Icare !
Ma mère avait une amie, Jeannette Korcia, que j’ai revue plus tard, pendant la guerre, dans le quartier juif d’Oran. A Oujda, J’ai dû accompagner ma mère une ou deux fois quand elle lui rendait visite dans le mellah, à l’insu de mon père qui redoutait les épidémies, le typhus surtout. Jeannette habitait avec sa nombreuse progéniture dans une rue qui exhalait une odeur de misère, mélange indéfinissable d’égout et d’immondices dans la touffeur de l'été. J’étais frappée par les murs nus badigeonnés à la chaux. A l’époque, partout des papiers peints très colorés décoraient les murs. Un pauvre mobilier aussi, nul objet décoratif, ni miroir, ni horloge, ni vase et pas de livres.

 Le 7 Juin 1948, 3 semaines après la déclaration de l’Etat d’Israël, des émeutes antijuives firent, en 3 heures, à Oujda où mon père vivait encore et à Djerada 43 morts et 155 blessés. Habitations et biens furent détruits. Le mellah d’Oujda fut reconstruit après ce « pogrom ».
J’ai l’amertume de constater que deux villes où j’ai vécu, celle de ma naissance et celle où j’ai passé une grande partie de mon enfance, ont vu déferler dans les quartiers juifs des hordes barbares d’émeutiers arabes : Constantine en Août 1934, avec la montée de l’antisémitisme nazi et Oujda, en juin 1948, avec l’antisionisme. Qui parle de coexistence pacifique ?
Il faut beaucoup d’idéalisme et d’optimisme pour espérer que des prétextes cesseront d’alimenter la haine à toutes les époques contre les minorités juives.
 Où donc est leur place ? Ils ont dû quitter ou fuir 10 pays arabes ou devenus arabes par la conquête. En Algérie, le code de la nationalité de 1963 n'a pas été modifié à ce jour et il faut être musulman pour prétendre à la nationalité. Dhimmis alors?

  1939. Oujda : Cours préparatoire à l'Ecole de la République.

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Le mellah à Oujda. Porte du mellah.
Au Maroc, Tanger et Larache n’ont jamais eu de mellah

Casa despana 2

La Casa d’España où j’ai appris à entonner l’Internationale,
en levant mon petit poing aux meetings de la S.F.I.O.



Oran 1941-1944. Le quartier juif  sous Pétain : ségrégation et rejet.

Les premières constructions du quartier juif à Oran datent du début du XIXème siècle. L’Espagne, restée en Oranie pendant 3 siècles en avait été chassée en 1790 par un tremblement de terre : « Oran fut conquise, Allah la rendit aux Musulmans » disait une inscription arabe pour commémorer cet événement. Lors de la reprise de la ville aux Espagnols, le bey Mohamed el Kebir, décidant de repeupler Oran dévastée et dépeuplée, fit appel aux habitants israélites de différentes villes d’Oranie. Pour relancer le commerce, il vendit à bas prix des terrains situés entre le Château Neuf et le Fort Saint-André à des juifs de Nedroma, Mostaganem, Tlemcen et Mascara avec la seule condition d’y construire sur des alignements donnés. 40 ans après le départ des Espagnols, les français firent leur entrée dans Oran, sans tirer un coup de feu.
La toponymie du quartier juif se réfère aux victoires de l’épopée impériale de Bonaparte à Napoléon III : rue de la Révolution, appelée « rue des juifs », rue d’Austerlitz, rue de Wagram, rue de Magenta, du Mont Thabor.
A Oran au début des années 1940, j’ai vraiment connu le phénomène de ségrégation et de rejet du « quartier juif ».
C’était la guerre, l’antisémitisme était virulent et actif. Nous avions quitté Taza où nous n’étions restés qu’un an parce que mon père avait été chassé de la Poste. Nous étions en Algérie, colonie française, département d’Oran, mais pendant les années 41-43 où nous avons vécu à Oran, le statut des juifs avait été promulgué sous le régime pétainiste de Vichy, le décret Crémieux aboli, les juifs chassés de leurs emplois, réduits au dénuement, les enfants exclus des écoles. Même en Métropole les enfants marqués de l'étoile jaune étaient restés sur les bancs des écoles ... hélas jusqu'aux rafles et déportations. Mais le zèle des antisémites en Algérie est allé jusque-là : exclure les enfants juifs des écoles dès 1941 ! Morinaud Emile, le maire antisémite de Constantine à l’époque de l’Affaire Dreyfus n'avait-il pas interdit aux juifs de se faire soigner dans les hôpitaux ?
A Oran, les rues du quartier juif, abandonnées des services de nettoiement et d’hygiène étaient nauséabondes. On y marchait au milieu de montagnes d’ordures. On glissait sur les pelures de melons et pastèques. Je l’ai vu.
Après un long séjour à l’hôtel, notre famille a habité 21 rue d’Arzew, une belle artère d’Oran, mais je rendais visite à ma grand’mère Nouna qui vivait chez sa fille Berthe au 22 rue de Wagram, face à un bain maure, au-dessus d’une laiterie dans le « quartier juif ».
Là on parlait certes français, on s’habillait à l’européenne, mais la misère était palpable. Le mari de ma tante Berthe, Gaston Sebban, facteur financier à la Poste, privé désormais d’emploi, colportait en car, de village en douar, deux valises de petite mercerie pour nourrir sa nombreuse famille. Huguette, ma petite cousine orpheline de mère, née en 1934, d’un précédent mariage de son père, deux fois veuf, se souvient avoir eu faim et souffert des privations. Le pain, obtenu contre des tickets, était rationné.
A Oran, j’ai compris que j’étais juive.
Mon père, né en 1903, était athée, laïc, un pur produit  de la IVème République radicale socialiste. Il pensait que pour saisir cette chance immense que nous offrait la France, pays des droits de l’homme et de la liberté, il fallait se débarrasser de tout ce qui avait fait de nous des judéo-arabes, soumis au statut de dhimitude, pendant tant de siècles. Cf. Coran verset IX, 29, qui sert de base scripturaire à toute la législation sur les Dhimmis, gens du Livre, Juifs et Chrétiens.
En 1940, la France l’a trahi, mais il n’est jamais revenu à la religion.
Quand, en Octobre 1941, j’ai été renvoyée de l’école, j’avais 7 ans, bientôt 8. Après mon renvoi de l’Ecole Publique, ma mère avait fait une vaine tentative pour m’inscrire chez les Sœurs. C’était la conversion et l’école ou le judaïsme et… « L’échoppe » cf. la déclaration de Giraud qui s'opposait au rétablissement du décret Crémieux en 1943 et décrétait : " les Arabes à la charrue et les Juifs à l'échoppe ! ».
 Après tant de siècles de résistance de ce peuple entêté ? Je sais gré à ma mère de son choix ! Elle pleurait mais a refusé le chantage et une lâche conversion.
 Les antisémites m’ont renvoyée à mon identité !
Après l’abolition du statut des juifs et le rétablissement du décret Crémieux, officiellement par de Gaulle le 23 Octobre 1943, soit presque 1 an après le débarquement des Alliés en Afrique du Nord en Novembre 1942, après bien des tergiversations des autorités, les enfants juifs de la République française fréquentèrent à nouveau l’Ecole Publique. L’assimilation à la France était déjà complète. En 1947, le décret Crémieux fut inscrit dans la Constitution.
La fascination pour la culture et la civilisation occidentales et l’extraordinaire volonté et faculté d’adaptation des Juifs avaient contribué à leur émancipation et beaucoup « avaient fait un bond en deux ou trois générations, du Moyen Age arabe aux XIXème et XXème siècles européens». Selon la formule de Chouraqui dans la Saga des juifs en Afrique du Nord.
C’est le cas des membres de ma famille paternelle à Tlemcen et maternelle à Constantine.
 

Constantine : 1941 puis 1944-1948 : Kar Chara le quartier juif. Un clivage d’une autre nature.
 J’ai évoqué longuement la vie du quartier juif dans le texte intitulé KAR CHARA.(cf V Constantine kar Chara quartier juif 1940-45).

« Kar Chara » c’était le petit peuple, rue Grand, rue Vieux, rue de France, rue Thiers. Certaines rues du quartier débaptisées, prirent ensuite les noms de soldats juifs morts pour la France mais l’Histoire ne leur laissa pas le temps de s’imposer : rue du Sergent Atlan, ex rue de France- Paul Atlan, professeur de philosophie, engagé dans les Corps Francs mort pour la France en Tunisie- rue des frères Lévy, rue du sergent Sultan … « Sic transit… »
J
A Constantine le clivage était d’une autre nature. Tous les habitants juifs étaient citoyens français mais le mode de vie des plus âgés était au confluent de deux cultures, deux civilisations.
J’ai vécu à Constantine en 1941-42, puis de 1944 à 1948. Pendant la guerre et tout de suite après.
A Constantine, la ville aux dix synagogues, la Jérusalem de l’Est, l’autre étant Tlemcen, les juifs nombreux avaient été parqués au XVIIIème siècle dans le quartier au bord du gouffre dit « Kar Chara » « le bas » ou « le cul » de la ville par le Bey Salah (1771-1792), le plus aimé des Beys constantinois sous la période turque, mort assassiné, celui-là même dont les Constantinoises musulmanes continuaient de porter le deuil avec leur haïk noir –ailleurs il était blanc- sûrement sans le savoir.
Le quartier juif constitué de maisons mauresques avait été agrandi au début du XXème siècle d’immeubles de style européen, rue Thiers et rue de France.
Dans les années 1940, les juifs vivaient toujours en grand nombre à « Kar Chara », près de leurs synagogues. La petite bourgeoisie juive avait déjà essaimé vers les faubourgs. Les plus âgés, souvent vêtus à l’orientale, parlaient arabe. C’est la seule ville de celles où j’ai vécu où des femmes âgées conservaient leur costume judéo-arabe traditionnel dans les années 1940-50. Dans certaines provinces françaises aussi, à cette époque, les costumes folkloriques bretons, alsaciens, normands etc… ainsi d’ailleurs que les patois n’avaient pas disparu.
 La population juive conservait des vestiges du long passé judéo-arabo-berbère. Des femmes âgées gardaient de l’époque ottomane le costume, la langue, les rituels partagés, les habitudes alimentaires, les croyances superstitieuses, le goût oriental des riches étoffes, des bijoux, des broderies en fil d’or. A la même époque, les habitants juifs des grandes villes côtières comme Alger et Oran, par exemple, étaient européanisés complètement.
A Constantine cependant, dès les années 1920- 1930, après la première guerre mondiale, les jeunes générations qui avaient fréquenté l’Ecole Publique ne parlaient qu’en français, avaient adopté le costume européen et le mode de vie occidental. Nombreux partaient faire des études supérieures à l’Université d’Alger et, après la seconde guerre mondiale, à Paris.

Mariage lea
  


Mariage adrienne 2












Mariage de Lea Sicsic et Marc Laïk



                                                                                                            Mariage d'Adrienne Moutout   Tlemcen 1930.
Sur les photos de famille, mariages notamment, le contraste est frappant entre les grands parents  dans leurs costumes traditionnels et les 2 ou 3 générations qui ont suivi tous vêtus à la mode européenne. Voir les deux grand'mères assises au premier plan.
Outre la langue et les vêtements, un élément de cette fulgurante évolution est le choix des prénoms. On abandonne très vite Messaouda, Meleha, Radia, Zerda, Guenouna dite Nouna (ma grand’mère paternelle), Said (mon arrière-grand-père paternel) qui figurent dans nos arbres généalogiques et on voit brusquement apparaître des prénoms Second Empire : Clara, Valentine, ma grand’mère maternelle, Augustine, Eugénie, ses sœurs nées à la fin du XIXème siècle. Puis Berthe, Germaine, Léa, les soeurs de mon père etc… Souvent les femmes âgées avaient des prénoms français mais des surnoms arabes comme les sœurs de ma grand’mère : Loueino, Zeiro.
 On traduisait aussi les prénoms arabes pour s'inscrire à l'Etat Civil : Sultana : Reine, Reinette; Johar : Perle, Perlette; Zhari : Fortunée, Félicie, Félicité; Chabba : Blanche; Ouardia : Rose; Haloua : Douce, autant de prénoms traduits de l'arabe très fréquents chez les femmes juives des vieilles générations.
Les générations de transition utilisaient encore la langue arabe ou un sabir franco-arabe en truffant le français de mots arabes ou judéo-arabes ou l’inverse.
A Constantine, j’ai vraiment vécu, à une époque charnière, la totale métamorphose de la population du quartier juif avec le contraste entre la vieille génération encore ancrée dans son passé et les nouvelles, instruites à l’école de Jules Ferry (« Nos ancêtres les Gaulois » !), assimilées à la France et à la civilisation occidentale. Un clivage existait aussi entre le petit peuple de Kar Chara et une certaine bourgeoisie juive aisée, évoluée, parfois française par senatus consulte dès 1865, avant le décret Crémieux et qui s’était éloignée du vieux rocher.

Tlemcen : 1948-1952. En pension

Un répit. « Harmonie illusoire ? ».

 

A Tlemcen, « la perle du Maghreb », « Sources » des Berbères (l’antique «  Tilimsen » en tamazigh) et « Vergers » des Romains (« Pomaria » en latin), la nature invitait à la paix. L’air était très pur, partout des sources, des ruisseaux, une végétation luxuriante, des oliviers à Mansourah, grenadiers, mûriers. En Mars, les amandiers se couvraient de fleurs roses, les noyers fleurissaient autour du Grand Bassin. J’aimais me joindre au groupe de pensionnaires qui partait en promenade le Jeudi et le Dimanche après-midi. J’ai des photos prises jeudi 10 novembre 1949 de paysages, de cascades, de sites exceptionnels. Située à 800m d’altitude, accrochée sur les contreforts très arrosés de l’Atlas, Tlemcen est une ancienne capitale religieuse, intellectuelle, en même temps que le centre spirituel du Maghreb. Avec ses 7 lieux de culte, elle a toujours été considérée par les juifs comme sainte. Ils y venaient en pèlerinage sur « le tombeau du Rab » et comparaient la ville à Jérusalem. Beaucoup de mosquées aussi, dont certaines magnifiques, spécialement la grande mosquée Djema El Kebir bâtie au XIIème siècle et située en pleine ville.
  
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  Photo de 1936 avec ma mère sur le tombeau du Rab. 

La ville arabe, très concentrée, avec ses ruelles étroites, était entourée de quartiers européens. Mais dans ma classe mixte, au Collège de Slane, les trois communautés : juive, arabo-berbère et européenne étaient mêlées. Les Musulmans, des garçons, étaient nombreux dans ma classe de la 3ème à la Terminale. Les filles qui n’étudiaient pas de langues anciennes étaient scolarisées au Collège de Filles dit E.P.S. En terminale, elles nous rejoignaient au Collège de Slane. Cette section n’existait pas à l’E.P.S. Quelques rares jeunes filles musulmanes arrivaient en pension parfois voilées de leur haïk blanc mais elles l’ôtaient devant le Collège. Nous avions aussi de nombreux professeurs arabes, surtout en Maths (Adam), physique(Allal) Sciences. Harmonie illusoire ? En tout cas, je n’ai jamais perçu de phénomènes de rejet ou d’exclusion, pas même de cloisonnements, de clivages dans la population juive malgré les différences de niveau de vie. Pas de quartier ghettoïsé, de ségrégation comme à Oujda, Oran, Constantine où le terme « Kar Chara » avait une connotation péjorative et suscitait au moins la condescendance chez les autres citadins des grandes villes.
A Tlemcen, le quartier juif d’origine occupait, selon l’histoire ou la légende, un espace près du Méchouar offert par gratitude au Rab pour sa communauté à l’intérieur des murs de la cité à la fin du XIVème Siècle. Avec le temps, ce quartier avait perdu son homogénéité et continuité avec, en particulier, le percement de la rue de France en 1846 par les soldats du Génie. Cette rue qui devint avec la place d’Alger et la Place de la Mairie le cœur de la ville, contribua à me donner l’impression que les juifs étaient certes très nombreux dans les rues adjacentes mais pas coupés des autres communautés. La toponymie est révélatrice : les rues Bensidoun, du Rab et de la Synagogue étaient probablement au cœur du quartier juif d’origine. Les autres noms attribués par l’administration coloniale ne manquent pas de sel pour un quartier juif depuis des siècles : St Cyprien, 1er évêque africain catholique martyr, Clauzel, conquérant français, Charles Quint et Ximénès, l’archevêque de Tolède à l’époque de l’Inquisition qui s’était emparé avec sa flotte de Mers El Kebir, le 19 Mai 1505, glorieux conquérant espagnol, pas spécialement philosémite ! Une façon pour les nouveaux maîtres de prendre possession des lieux ? « Ense, Cruce » ?

En outre, à Tlemcen, après la guerre, la bête immonde du racisme et de l’antisémitisme, repue de 6.000.000 de victimes juives somnolait.
Et nous étions inconscients du désir de justice et d’égalité ou d’indépendance qui travaillait les élites musulmanes et des événements qui se préparaient. Pourtant les émeutes de Sétif en 1945, si durement réprimées auraient dû nous ouvrir les yeux. « Je vous donne la paix pour 10 ans ! À vous de vous en servir pour réconcilier les deux communautés !» avait dit le général Duval. Neuf ans après, la Toussaint 1954 !
A peine 2 ans après mon départ de Tlemcen se sont constitués des réseaux terroristes, communistes essentiellement, où ont été impliquées deux camarades de pension dont j’ai partagé la vie : Keira Aziz et Danielle Minne. Keira a été tuée. Une infirmière assure avoir reconnu son corps à l’hôpital. Elle vint me voir en 1953-54 à Alger où j’étais étudiante. Je ne m’expliquerai que bien plus tard sa présence dans la capitale, à cette date-là où s’organisait le terrorisme urbain. Je raconterai ses questions, ses silences, ses réponses évasives, sa méfiance probable.

L’époque de l’innocence : Keira et Danièle.

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Danièle Minne. Photo de 1952

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                                                                                                     Kheira Aziz

 

Danièle Minne, la fille de notre nonchalant professeur de philo, à qui, nous « les grandes » du «dortoir des grandes » en pension, faisions les tresses tous les matins, est née en 1939. Elle prit le maquis à 18 ans en 1957 après l’arrestation de sa mère, ex Mme Minne, professeur de Lettres, devenue Mme Guerroudj, condamnée à mort puis graciée le 8 mars 1962. J’en reparlerai aussi.
Danièle libérée en avril 1962 « rebaptisée » Djemila, mariée, et sa mère vivent en Algérie. Je les ai vues dans un reportage à la télévision. La vieille dame a parlé de sa condamnation à mort, mais pas des crimes terroristes lâches contre des civils innocents dont elle s’est rendue au moins complice.
Mais je pleure encore toujours ma délicieuse et si jolie, limpide compagne de dortoir, Colette Cohen, au sourire et aux joues d’enfant, dont le lit était, pendant 4 ans, juste à la droite du mien sous une grande fenêtre. Nous chuchotions après l’extinction des feux. De quoi parlions-nous ? De choses insignifiantes ! Nous ne refaisions pas le monde ! Colette était sereine, douce, discrète, une adolescente tranquille, à l’aise dans la vie, comme ignorant le mal.
Elle est morte en Juillet 1962, victime d’une barbarie aveugle et surtout absurde à cette date où tout était joué, après les accords d’Evian et la grâce accordée aux militants F.L.N.
Pas de grâce pour elle ! Elle est morte, disparue, sans laisser aucune trace avec son mari Jean-Jacques Sicsic, ses deux parents, deux amis et leurs deux autos sur la route Beni-Saf –Oran. Le jeune couple était instituteurs à Beni-Saf et se préparait à partir après l’année scolaire. Jean- Jacques et un ami étaient partis pour expédier leur auto au port d’Oran. Inquiets de ne pas les voir revenir, Colette et ses parents sont partis à leur recherche sur cette même route. Tous ont disparu. Et aucune trace des deux autos ! Le jeune couple a laissé deux très jeunes enfants orphelins et une famille désespérée. La jeune sœur n’a pas supporté de survivre.

Voir le très émouvant film de Hélène Cohen, sa nièce, en quête de vérité (été 2012). Algérie 1962. L’été où ma famille a disparu.


L’époque de l’innocence
 
Photo de février 1952 dans la cour du Collège : un groupe de pensionnaires. Colette en haut, 2ème en partant de la droite, Keira en bas, 3ème en partant de la gauche. Claude en bas : 1ère en partant de la gauche.

 


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  pensionnaires-3-1950.jpg1950 Dans la cour. Colette 1ère en bas à gauche. Je suis au-dessus

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Collège de Slane : année 1950-51 Classe de 1ère
En Classe avec Mr.  Forrado professeur d'histoire et géographie. Belle jeunesse mêlée, chrétiens, musulmans et juifs ! Et garçons et filles !
 Trop parmi mes camarades ont aujourd'hui disparu depuis longtemps déjà : Jean Cros, Pierrot Benichou, Joseph Bensaid, Jean.P. Maussion et bien d’autres dont j’ignore le destin.
 
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J.P.Millecam, professeur de philo et écrivain et des élèves de la classe lors d'une magnifique promenade avec ma petite sœur Josiane, Pierrot Benichou, Annie Courmontagne,  Mokrani, Chouikhi, Bouayed avec un masque, toujours farceur, meneur et chahuteur aussi. Pauvre jeune prof de Sciences Naturelles au visage rose, poupin, livrée toute fraîche, inexpérimentée  de Métropole ! 

                               

 

 

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  Distribution des prix 1952 Madame Martin, Directrice de l'E.P.S. me remet un prix.

 1952 dernière distibution des prix pour nous. Dernière année de pension à Tlemcen où nous n'aurons plus jamais l'occasion de revenir, ma soeur Josiane et moi. Au second plan on distingue ma mère et mon oncle Maurice tout sourire vers l'objectif. Ils arrivaient de Constantine en auto avec Zidane , le chauffeur du magasin 4 rue Casanova, pour nous ramener définitivement avec toutes nos affaires après 4 années de pension. Je continuerai ensuite mes études à Alger et Josiane finira les siennes à Constantine puis Alger.

 

Deux « Justes » :
Mme Martin Directrice de L’EPS et de notre pension à qui je rends hommage parce qu’elle a donné des cours d’Anglais aux élèves juifs exclus et qu’elle a même tenu à assister à leur distribution des prix dans une « école juive ». Elle a répondu affectueusement à une de mes lettres d’Alger en signant : votre « Alma mater ».
Son mari Mr Martin, professeur d’histoire géographie« Fou Tchéou* pour des générations de potaches, manifestait son refus de Vichy en restant ostensiblement dans sa classe au moment du lever des couleurs instauré par Pétain. Il mérite notre reconnaissance pour son courage. Peu ont osé.

*Fou-tchéou ou futzu ou foochow à l’origine du sobriquet est le nom d’une bataille navale (23 août 1884) qui marqua le début de la guerre franco-chinoise qui dura 16 mois.

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Les magnifiques promenades du Jeudi et du Dimanche avec les pensionnaires. Jeudi 10 Novembre 1949. Sur ces deux photos Kheira a grimpé tout en haut.

Alger : 1952-1961. « Les événements» et l’exode.

A Alger, enfin, j’ai vécu ce que nous appelions «les événements» et l’exode. Beaucoup de juifs, surtout modestes ont milité activement et quelques-uns même dans l’O.A.S, surtout à Alger et Oran, dans le désespoir, en 1962, de la perte de l’Algérie, la terre de leurs racines depuis des siècles.
Mais nous sentions bien que le vent de l’Histoire ne soufflait pas dans un sens favorable pour nous. Les plus lucides ont vite compris qu’il leur faudrait partir, certains même dès le milieu des années 1950, surtout dans le Constantinois où l’on n’oubliait pas 1934 et 1945. C’est le cas de ma famille maternelle qui prit la décision de partir après les bombes du 20 Août 1955, rue Caraman et au cinéma A.B.C. et la mort du neveu de Ferhat Abbas dans sa pharmacie, mais nous n’avions jamais imaginé la tragédie finale.
Je ferai le récit de ce que nous avons vécu.
A partir de 1952, j’étais étudiante en hypokhâgne, puis en khâgne, au Lycée Bugeaud à Alger.
Alger est une capitale superbe, ouverte partout sur la mer. De la fenêtre de notre classe, au Lycée Bugeaud, nous surveillions l’état de la mer et dès le 1er Avril nous étions dans l’eau. Dans le quartier populaire de Bab-el-Oued, près du Lycée, j’habitais d’abord chez une vieille dame Mme Berrebi, 2 Place Wuillermoz, au rez- de- chaussée sur une cour intérieure où couraient des rats d’égout. Dans la cuisine, nous avions la visite presque quotidienne de petites souris intelligentes et peu méfiantes. J’ai pleuré quand l’une d’entre elles, minuscule, s’est laissé piéger par une souricière. Puis, nous avons loué, très cher,- une grave pénurie de logements sévissait-, un deux pièces, sans grand confort pourtant, dans un immeuble rénové, au 13 rue Fourchault, pas loin de la Place des Trois Horloges, juste en face d’une usine de tabac qui faisait un bruit infernal et dégageait une odeur âcre, irritante.
A Bab-el-oued vivait le petit peuple. Les origines juives, espagnoles, italiennes, maltaises, mahonnaises etc… se différenciaient de moins en moins. De tout ce « melting-pot » s’était forgé au fil des générations, dans le giron de la France, un type nouveau, avec son langage, son accent, ses mœurs, sa cuisine, représenté de façon pittoresque dans « La Famille Hernandez » de Geneviève Baïlac.
C’est seulement en 1962, après l’exode en France, que nous avons découvert, surpris, que nous étions des « pieds noirs ». Nous n’avions jamais entendu cette expression dont l’origine garde son mystère.


Conclusion du préambule.

Avec l’indépendance de l’Algérie en Juillet 1962, le pays s’est vidé de toute sa population juive qui pourtant vivait là depuis des siècles sinon des millénaires. Les juifs étaient présents sur cette terre avant la destruction du Second Temple par les Romains en 70, en même temps que les Phéniciens qui pratiquaient le commerce. Des vagues successives de persécutés sont arrivés au Moyen-Age de France, d’Angleterre et de toute l’Europe. En 1390, après les émeutes anti juives, et surtout après 1492 et l’Edit d’expulsion d’Isabelle La catholique qui visait aussi les Musulmans, pendant la « Reconquista », les juifs affluèrent nombreux d’Espagne en Afrique du Nord. 
Cette population indigène, ce peuple qui avait subi, sans perdre son identité juive, successivement les invasions romaine, vandale, byzantine, arabe, turque et toutes les humiliations, persécutions et massacres et accueilli la France « pays des droits de l’homme et de la liberté » en 1830, a été entièrement balayée par cette dernière tempête de l’Histoire.

Tous les juifs ont quitté cette terre définitivement pour une nouvelle « Diaspora ».
130.000 arrivés en France, citoyens français déracinés.
En octobre 1962, il ne restait que 25.000 juifs en Algérie dont 6000 à Alger. En 1971 ils n’étaient plus que 1000. En 1982, 200. En 1990, pratiquement plus.
A Constantine, le vieux Kar chara, avec ses très vieilles maisons mauresques dont celle où est née ma mère, 79 rue Vieux, tombe en ruines. La Synagogue de mon grand-père place Négrier dite « Temple algérois » la plus récente pourtant, a été rasée pour laisser place à un parking. A Tlemcen, la vieille maison où ont vécu mes grands-parents Sicsic, 31 rue de France, n’a pas résisté aux travaux d’aménagement et s’est effondrée. Où sont nos tombes ? Même si elles n’ont pas été détruites par le temps ou les hommes ou profanées, je ne saurais les retrouver. Je n’envisage vraiment pas de pèlerinage. « lè fet met », comme disaient nos grands-mères. C’est dans nos mémoires que nous devons chercher la trace de nos ancêtres.

J’ai trouvé dans le FIGARO du 26 Janvier 2010 l’avis de décès du « dernier juif de l’Oranais », Messaoud Prosper Chétrit originaire du Maroc. Il était conservateur du cimetière israélite d’Oran. Il a été inhumé dans le lieu de mémoire dont il avait la garde.

L’Algérie a connu :
654ans d’influence phénicienne.
576ans de paix romaine.
104ans de destructions vandales.
113ans de vaine reconstruction byzantine
872ans d’occupation arabe avec les différentes invasions des Hilaliens, des Almoravides et des Almohades.
311ans d’arbitraire turc.
132ans de colonisation française.

850000 juifs chassés au XXème siècle des pays arabes.
Au Maroc, le nombre Juifs est passé de 286.000 en 1948 à 50.000 en 1968. Début 2015, ils n’étaient plus que 2.500. En Algérie, ils étaient 130.000 en 1948 contre 1.500 en 1968, de même qu’en Égypte, ils sont passés de 75.000 à moins de 1.000
durant la même période.
 



 
  • 1. Annabelle | Dim 13 Avr 2014

Passionnant recit... Merci pour ce voyage!

 

gozlan lucien
  • 2. gozlan lucien | Ven 20 Sept 2013

Madame pour votre recit sur bab el oued, votre habitation a la rue fourchault, il y avait au rez de chausse un atelier de soudure ou je venais faire reparer les becs de gaz en fonte que l on faisait tomber par terre sans faire expres et qu il fallait refaire souder. Cet atelier avait disparu avec la renovation de cet immeuble, en face etait reste le bain maure.
Dans cette rue fourchault, comme vous le rappelez si bien, il y avait aux alentours de cette fabrique, l atelier du pere de mon ami que je revoyais tous les jeudis a l alliance de la rue Suffren, et qui fabriquait des dragees, son nom c etait ACHOUR, et puis au fond de la rue sur la gauche on prenait des escaliers pour aboutir au cinema Le Suffren et de la, par une serie de petites marches en allant vers le haut, on tombait sur l avenue general Verneau et le cinema le Plaza. Merci pour tous ces souvenirs, vous les racontez si bien...


 

 

 

 

 

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